De tout et de rien mais surtout de tout : de l'actualité aux voyages, en passant par la culture, littérature, cinéma, l'Art et jusqu'à la cuisine ou la politique, parfois le tout en même temps à 4 mains, à loisir et à l'envie ! Pourquoi ? Parce qu’un et un font un, parce qu’ils existent, parce que c’est suffisant et insuffisant à la fois, parce qu’ils sont toujours d’accord, parce qu’ils ne sont jamais d’accord, parce qu’il est persuadé d’avoir raison, parce qu’elle sait qu’elle a toujours raison, parce qu’il y aura toujours des questions insolubles, parce qu’il y a trop de personnes porteuses de vérités prêtes à l’emploi, parce qu’il y en d’autres envahies de doutes, parce que la liberté de s’exprimer, de se laisser porter est un privilège dont on n’a pas toujours conscience, parce qu’il faut l’explorer comme on explorerait un nouveau continent . Parce qu’ils ne se prennent pas au sérieux, parce qu’ils se prennent trop au sérieux, parce qu’ils ne peuvent pas se passer d’internet, parce qu’ils aiment réagir, interagir, parce qu’un poste de télé ou un bon bouquin ça n’a pas beaucoup de répartie, parce qu’ils aiment des choses, sont dégoûtés, énervés, par d’autres, parce qu’ils contemplent. Parce qu’IL s’imagine en ermite reculé d’un monde fou au bord d’un étang, parce qu’ELLE veut voir le monde, parce qu’ils ont vu, parce qu’ils ont à voir, parce qu’IL repense la vie, l’univers et le reste dans un trempage hebdomadaire, parce qu’ELLE invente des vies, des univers et des restes dans des nuits blanches quotidiennes, parce qu’ELLE s’ennuie, parce qu’ils sont bavards, parce qu’ils sont timides, parce qu’ils sont différents, parce que les autres sont les autres, parce qu’ils sont de grands gamins et parce qu’ils en ont envie : le blog des reinettes, bavardages avec les grenouilles sur un bord d’étang reculé ou sur un coin de toile pseudo-sociale ! IL et ELLE
11 Novembre 2018
Le centenaire de la fin de la guerre de 1914-1918 est célébré ce jour, entre autre, par le chant de la Marseillaise de Berlioz. Souvent, les enfants des écoles de cycle 3 (dont les programmes précisent l'apprentissage de notre hymne national) ont été priés de participer à cette initiative à la fois patriotique et artistique. Dans la plupart des villes et villages, tout les habitants sont invités à venir chanter.
Ces initiatives ont soulevé des problèmes d'accords derrière les partitions !
Certains choristes « seniors » répugnent à célébrer la fin de l’horreur des tranchées, des charges meurtrières, des obus et des gaz en chantant les paroles belliqueuses de l’hymne national. Les familles dont les enfants ont été sollicités ont réagi diversement, les unes acceptant leur participation, d’autres la refusant. On pouvait s’interroger sur la pertinence de cette initiative dans les régions de France dont une partie des habitants porte le souvenir des troupes coloniales et de la guerre d’Algérie. Et que penser, parmi les couplets retenus par Berlioz, de celui qui commence fameusement par
«Nous entrerons dans la carrière…» et s’achève ainsi :
«Bien moins jaloux de leur survivre
Que de partager leur cercueil
Nous aurons le sublime orgueil
De les venger ou de les suivre» ?
Ces formules, langage à part, dépareraient-elles dans une vidéo djihadiste ?
Les discussions provoquées par la célébration du centenaire et le style qu’entend lui donner le Président de la République ne sont pas de vaines querelles parisiennes. Commémorer la paix ou la victoire, rappeler les souffrances ou exalter le sacrifice, ces questions touchent au cœur de la société française : la nation, ce sont des souvenirs et une volonté. De quoi sommes-nous appelés à nous souvenir depuis quatre ans et maintenant, au terme du travail de mémoire accompli tant par les institutions (scolaires principalement) que dans la diversité infinie des lieux et des milieux ? Comment nous représentons-nous la communauté nationale et à quoi sommes-nous prêts à adhérer ?
Le moment présent rappelle à quel point la Grande Guerre a marqué, plus que tout autre événement depuis la Révolution, l’histoire et le destin français. Un siècle après, les pensées et les conduites relatives à cette guerre sont toujours aussi diverses et plus ou moins brutalement divergentes. Il y a près de trente ans, le roman de Jean Rouaud intitulé Les Champs d’honneur avait crevé la surface des modes intellectuelles et politiques en rappelant la blessure infligée par 14-18 et la cicatrice qu’elle a laissée dans les familles de toutes catégories sociales, de toutes régions et de toutes traditions spirituelles et politiques.
Aujourd’hui, le centenaire réveille des oppositions toujours latentes et met au défi l’État et son chef d’écrire un discours qui indique une direction et puisse rassembler une majorité du pays. Cette situation ressemble à celle des républicains dans le dernier quart du XIXème siècle, quand ils devaient se prononcer, environ cent ans après eux aussi, sur la Révolution. La phrase célèbre de Clemenceau à la tribune de la Chambre en 1891 « La Révolution française est un bloc dont on ne peut rien distraire » pourrait-elle être transposée à la Grande Guerre ? Est-il possible, pour paraphraser Marc Bloch, de vibrer à l’élan d’août 1914 et de pleurer aux dizaines de milliers de morts qui suivirent aussitôt ? De suivre Péguy dans Paris jusqu’à la gare de l’Est et de maudire le socialiste qu’il était d’être passé de « l’autre côté » ? D’admirer l’ardeur des officiers et de plaindre l’impuissance des soldats ? D’applaudir à l’intransigeance du « Tigre » et d’éprouver la colère de ceux qui en payèrent le prix ? De chanter la France victorieuse et de condamner son mépris aveugle pour le désastre allemand ?
Un homme de la Troisième République est resté discret (à la différence d’un Gambetta, d’un Clemenceau, d’un Jaurès) malgré plusieurs titres (et quelques portes) dans l’histoire. Il s’agit de Joseph Caillaux. Initiateur de l’impôt sur le revenu, ce ministre des Finances, puis chef du gouvernement, dont l’évolution de la droite à la gauche n’est pas sans rappeler celle de Mitterrand, avait évité la guerre avec l’Allemagne en 1911. Président du Parti radical en 1913, il était promis à remporter les élections législatives du printemps 1914 et avait très probablement l’accord de Jaurès pour un soutien sans participation des socialistes à un gouvernement qui, peut-être, aurait évité la guerre une deuxième fois. La violence de la campagne menée contre lui par la droite, à cause de l’impôt sur le revenu et à cause de la conciliation de 1911, a poussé sa femme à tuer le directeur du Figaro, ce qui contraignit Caillaux au retrait et au silence. Fin 1917, Clemenceau le faisait incarcérer à la Santé pour pacifisme.
Un des aspects les plus intéressants de la pensée de Caillaux est son anticipation de l’union européenne, qu’il jugeait nécessaire et, à terme, inévitable. Il était évidemment hors de question de faire entendre cela à Clemenceau ou à Poincaré. Un siècle plus tard, le nationalisme a le vent en poupe et prétend dicter la manière de commémorer l’armistice de 1918.
Mais revenons à Berlioz. Sa version de la Marseillaise, théâtrale et redoutablement efficace, écrite dans l’enthousiasme des « journées » de juillet 1830, voulait exalter le peuple et non la guerre. L’histoire nous a appris les dangers de ce populisme et de l’âge des masses, en gestation dans les évolutions techniques et politiques du monde industriel alors naissant, l'actualité nous en rappelle la présence et les dangers toujours actuels. Mais il y a aussi dans la musique de Berlioz, un hymne à la fraternité dépouillée de tout apparat et capable d’endurer la défaite bien plus que de s’enivrer de la victoire. Chanter cette Marseillaise-là peut être une manière d’honorer ceux qui ont souffert pour elle ou à cause d’elle.
ELLE
Le moment présent rappelle à quel point la Grande Guerre a marqué, plus que tout autre événement depuis la Révolution, l’histoire et le destin français. Un siècle après, les pensées et les conduites relatives à cette guerre sont toujours aussi diverses et plus ou moins brutalement divergentes. Il y a près de trente ans, le roman de Jean Rouaud intitulé Les Champs d’honneur avait crevé la surface des modes intellectuelles et politiques en rappelant la blessure infligée par 14-18 et la cicatrice qu’elle a laissée dans les familles de toutes catégories sociales, de toutes régions et de toutes traditions spirituelles et politiques.
Aujourd’hui, le centenaire réveille des oppositions toujours latentes et met au défi l’État et son chef d’écrire un discours qui indique une direction et puisse rassembler une majorité du pays. Cette situation ressemble à celle des républicains dans le dernier quart du XIXème siècle, quand ils devaient se prononcer, environ cent ans après eux aussi, sur la Révolution. La phrase célèbre de Clemenceau à la tribune de la Chambre en 1891 « La Révolution française est un bloc dont on ne peut rien distraire » pourrait-elle être transposée à la Grande Guerre ? Est-il possible, pour paraphraser Marc Bloch, de vibrer à l’élan d’août 1914 et de pleurer aux dizaines de milliers de morts qui suivirent aussitôt ? De suivre Péguy dans Paris jusqu’à la gare de l’Est et de maudire le socialiste qu’il était d’être passé de « l’autre côté » ? D’admirer l’ardeur des officiers et de plaindre l’impuissance des soldats ? D’applaudir à l’intransigeance du « Tigre » et d’éprouver la colère de ceux qui en payèrent le prix ? De chanter la France victorieuse et de condamner son mépris aveugle pour le désastre allemand ?
Un homme de la Troisième République est resté discret (à la différence d’un Gambetta, d’un Clemenceau, d’un Jaurès) malgré plusieurs titres (et quelques portes) dans l’histoire. Il s’agit de Joseph Caillaux. Initiateur de l’impôt sur le revenu, ce ministre des Finances, puis chef du gouvernement, dont l’évolution de la droite à la gauche n’est pas sans rappeler celle de Mitterrand, avait évité la guerre avec l’Allemagne en 1911. Président du Parti radical en 1913, il était promis à remporter les élections législatives du printemps 1914 et avait très probablement l’accord de Jaurès pour un soutien sans participation des socialistes à un gouvernement qui, peut-être, aurait évité la guerre une deuxième fois. La violence de la campagne menée contre lui par la droite, à cause de l’impôt sur le revenu et à cause de la conciliation de 1911, a poussé sa femme à tuer le directeur du Figaro, ce qui contraignit Caillaux au retrait et au silence. Fin 1917, Clemenceau le faisait incarcérer à la Santé pour pacifisme.
Un des aspects les plus intéressants de la pensée de Caillaux est son anticipation de l’union européenne, qu’il jugeait nécessaire et, à terme, inévitable. Il était évidemment hors de question de faire entendre cela à Clemenceau ou à Poincaré. Un siècle plus tard, le nationalisme a le vent en poupe et prétend dicter la manière de commémorer l’armistice de 1918.
Mais revenons à Berlioz. Sa version de la Marseillaise, théâtrale et redoutablement efficace, écrite dans l’enthousiasme des « journées » de juillet 1830, voulait exalter le peuple et non la guerre. L’histoire nous a appris les dangers de ce populisme et de l’âge des masses, en gestation dans les évolutions techniques et politiques du monde industriel alors naissant, l'actualité nous en rappelle la présence et les dangers toujours actuels. Mais il y aussi dans la musique de Berlioz, un hymne à la fraternité dépouillée de tout apparat et capable d’endurer la défaite bien plus que de s’enivrer de la victoire. Chanter cette Marseillaise-là peut être une manière d’honorer ceux qui ont souffert pour elle ou à cause d’elle.
Tous frères ?
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ELLE