25 Mai 2017
Voilà quasiment un sujet de philo, illustré par des films comme Inception ou Matrix. Comment définir la réalité, comment savoir que nos sens traduisent quelque chose de tangible ou d'objectif ?
Ce sont des questions récurrentes à partir du moment où nous prenons conscience : si nous sommes conscient d'exister, c'est que ce qui nous est extérieur doit aussi exister. Pour autant entre notre conscience et l'extérieur il y a nos sens, et rien n'est plus facile que de les détourner.
Une illusion d'optique nous amuse, notre cerveau détourne la réalité.
Une impression de déjà vu, notre cerveau, encore lui, joue avec notre perception.
Il y a d'autres exemples cinématographiques. Je pense au Congrès, qui prend sa source dans une adaptation d'un livre de S. Lem. Il s'agit de superposer aux sens, un monde imaginé motivé par des substances chimiques. L'idée est une forme de lavage de cerveau pour manipuler les foules. Mais les applications sont pléthoriques. Il n'y a qu'un pas pour passer de la stimulation chimique à la stimulation électronique. La réalité augmentée superpose à nos yeux des parcelles imaginaires, la réalité virtuelle est en passe de remplacer la réalité...réelle.
Le fait de pouvoir jouer ainsi avec la réalité implique de se poser la question sur ce que nous voyons, nous comprenons, théorisons. Le débat a été relancé il y a peu par Elon Musk qui croit dur comme fer que nous sommes dans une simulation numérique, tout ce que nous en observons peut correspondre à ce qu'il se passerait dans un tel cas. Ce genre de proposition s'appuie en particulier sur nos limitations dans la compréhension de notre univers, ou le fait de concevoir de nouvelles forces ou éléments toujours plus complexes pour faire tenir des théories existantes comme si un voile devait demeurer perpétuellement baissé sur notre connaissance.
Cela dit, est-ce qu'une telle assertion, celle de la simulation numérique, est si différente de celle qui conçoit des univers parallèles dans un multivers infini, ou d'un univers ayant de nombreuses dimensions bien inconcevables pour nos yeux ou nos doigts ?
Finalement, est-ce que cette question a un sens unique, ou est-ce un cul-de-sac ? Le monde qui nous entoure fait cohabiter au gré des croyances ou des connaissances, un univers créé en 7 jours, un univers créé il y a 13.8 milliards d'années, un univers fini mais dont ne pouvons pas connaitre les limites, un univers en bulle de savon aussi éphémère ... qu'une bulle de savon.
J'ai tendance à préférer la connaissance scientifique, car c'est une approche contagieuse naturellement, chacun peut logiquement adhérer à ce que la science avance, car des faits reproductibles étayent ces connaissances. La croyance doit être repoussée toujours plus loin pour éviter de faire des vagues incohérentes.
Alors, prenons le regard de la science comme une manière d'observer une forme de réalité. Du moins, avec les outils qui nous sont donnés, nos yeux, notre cerveau malléable, nos doigts.
Avec cette manière de voir, on définit une façon d'appréhender le monde qui nous entoure relativement objective, dans la mesure ou chacun peut en faire la même expérience (l'objectivité intervient quand toutes les subjectivités vont dans le même sens).
En soit cela pourrait être suffisant. Mais cela ne répond pas vraiment à la question du début. Un rêve peut être plus réel que ce que nous vivons, l'absence de sens peut nous faire perdre pied face à la réalité recherchée (Johnny S'en Va En Guerre), la Matrice peut alimenter nos sens sans que nous en ayons conscience. C'est la même chose que de se dire que l'univers a pu être créé il y a une seconde en intégrant un passé fictif que nous redécouvrons avec notre mémoire implantée ou nos perceptions et qui complète parfaitement ce que nous vivons à l'instant.
Si c'était le cas comment le savoir ?
Si notre réalité est une simulation, comment le savoir ?
Vu d'ici, pour l'instant je ne vois que la mort pour savoir dans quoi nous vivons... d'une autre manière (ou pas, cela dépend des croyances). Disons, si la conscience perdure après la cessation de la vie, alors à ce moment là nous saurons où nous sommes (et peut-être qui nous sommes).
Pourtant, ne pourrions-nous pas trouver un endroit, une faiblesse à expérimenter si nous étions dans une simulation informatisée ? Silas Beane cherche une solution physique à ce problème épineux.
Il semble que la nature se dérobe toujours à la précision de nos observations, les nombres irrationnels sont infinis, le hasard et ses probabilités jamais démenties. Un ordinateur ne peut pas construire un hasard parfait, du moins, pas en utilisant des 0 et des 1. Peut-être qu'un ordinateur quantique le pourrait, mais rien n'est moins sûr, du moment que des règles logiques implémentées restent incontournables et ne sont pas aléatoires. Alors pourquoi ne pas scruter ce hasard...
D'un autre côté, il y a les tenants d'une forme de déterminisme, de destinée. Dans ce sens, un démiurge peut s'apparenter à un ordinateur simulateur. Un dieu choisit nos avenirs, comme un programme nous oriente et nous dirige vers un but qui nous dépasse. Les voix du Seigneur sont impénétrables, les arcanes d'une Matrice ne nous sont pas accessibles. Est-ce si différent de laisser la vie, l'univers et le reste totalement régentés par un esprit supérieur, ou de laisser un programme informatique orienter la vie, l'univers et le reste ?
La question est donc assez délicate, d'autant plus qu'elle touche aux fondements d'une liberté que nous aimerions être réelle. Pour ma part, j'en viens à me dire que toutes les conceptions sont équivalentes sans se contredire. Ce n'est pas si important. En effet, quelles que soient le mode, les règles ou les lois qui déterminent un peu, beaucoup, passionnément, ou pas du tout, notre avenir ou notre "libre-arbitre", il n'en demeure pas moins que je pense, je suis conscient d'être. C'est là que se situe ma liberté, pas dans la perception du monde extérieur, ni dans la possible réalité de mes rêves ou d'être le rêve de quelqu'un d'autre. La conscience d'être ne nous subordonne pas à un univers si vaste soit-il. Bien au contraire. Cela fait de nous des êtres qui peuvent énoncer une réflexion, un choix, une idée. Bien sûr, on pourra discuter de la liberté de choisir dans un monde encadré, mais je parlais du fait de poser les termes du choix. La réponse que l'on y apporte est, effectivement, souvent induite.
Si on assortit cette pensée sur soi, cette conscience d'être, d'un peu de raison alors toutes les portes nous sont ouvertes et on peut accepter librement n'importe quel avenir, qu'il soit prédestiné, prédéterminé ou pas. C'est ainsi que Johnny trouve son espoir et peut vouloir vivre. C'est ainsi que Donnie Darko accepte un autre destin que celui qu'il avait pu suivre initialement, ou que G. Bailey de la Vie est Belle se trouve sur une autre trajectoire légèrement induite.
La liberté d'être (non pas la liberté de faire, la liberté intérieure l'emporte sur la liberté sociale) permet de jouer avec le temps et de s'émanciper des vicissitudes et autres alea que le monde extérieur nous impose.
Alors, simulation ou réalité, rêve ou illusion, cela ne fait aucune différence. Dans tous les cas, nous existons car nous pouvons nous poser cette question, même si nous ne sommes que des figurants (merci Austin Powers de leur donner la parole ^^).
IL
Je tiens à préciser que je ne cautionne absolument pas la plupart des exemples choisis par IL !
Je suis bien plus terre à terre que lui et pour moi, Matrix & co : même pas en rêve ! La problématique reste que devant ce genre de films, je m'endors et comme le dit Paul Valéry, "la meilleure façon de réaliser ses rêves et de se réveiller"...
ELLE